Les femmes peuvent-elles être daltoniennes ?
Un des faits les plus véhiculés par ceux qui ont une connaissance très sommaire du daltonisme est que seuls les hommes peuvent être daltoniens. En plus de répondre à cette question, nous verrons ici pourquoi cette idée est si répandue et comment l’expliquer simplement.
Sommaire
Une histoire de gènes
Pour comprendre la distribution du daltonisme, il faut comprendre ses causes. L’article Pourquoi est-on daltonien ? détaille déjà la question. Nous allons donc résumer uniquement ce qui nous intéresse :
- Le daltonisme est héréditaire
- Il y a 3 types de cônes dans les yeux qui créent la vision des couleurs (« bleus », « verts », « rouges »)
- Ces cônes sont codés par des gènes (opsines)
- Les gènes codant les cônes « verts » et « rouges » sont situés sur le chromosome sexuel (X)
- Une femme à 2 chromosomes X, un homme à un chromosome X et un Y
- Il suffit d’un chromosome X avec des gènes normaux pour coder les cônes « verts » et « rouges » correctement
Pour résumer, des schémas valent mieux qu’un bon discours. Les hommes sont représentés à titre de comparaison.
Il est donc bien moins probable pour une femme d’être daltonienne. C’est pour cela qu’il y a environ une femme sur 200 qui est atteinte contre un homme sur 12.
Les plus attentifs auront remarqué que je m’attache uniquement aux cônes « rouges » et « verts » et non aux « bleus ». C’est parce que les daltonismes liés à ces cônes sont dus à la déficience d’un gène sur une paire de chromosomes commune aux femmes et aux hommes. Il y a donc autant de chances pour les unes comme pour les autres d’être affectés. Néanmoins, ce daltonisme est très rare (pour tout le monde).
Pourquoi cette idée reçue tenace
Comme vous le savez déjà, le daltonisme n’est pas un phénomène qui soulève les foules et fait le buzz ! Mais bien que de plus en plus de personnes aient au moins une vague idée de ce que c’est, il est extrêmement rare qu’elles aient connaissance du fait que les femmes peuvent être affectées. Pour comprendre pourquoi, il va falloir faire …
.. un peu d’histoire
Le daltonisme a fait pour la première fois l’objet d’un article scientifique en 1798 par John Dalton. Il y parle de troubles de la vision des couleurs, mais à l’époque, impossible de recenser les personnes atteintes ou non.
Il faudra ensuite attendre 1917 pour avoir le test d’Ishihara et pouvoir commencer à dépister correctement le daltonisme. Ce test n’est bien-sûr à l’époque pas très connu, et peu de personnes (hommes comme femmes) sont dépistés.
Il faudra attendre 1986, pour que Nathans et Piantanida découvrent que les gènes qui codent les opsines des cônes « verts » et « rouges » se situent sur le chromosome X.
Des croyances tenaces
En clair, depuis les années 1800, on commence à parler de trouble de la vision des couleurs. Au cours du XIXème siècle et d’une majorité du XXème siècle, on considère l’existence de cette anomalie et les tests (sporadiques) sont assez clairs : les hommes sont touchés, les femmes ne le semblent pas.
En effet, quand on voit la différence de proportions, il est facile de conclure que les rares femmes ayant cette déficience sont des faux positifs. Sans compter le fait que ce genre de tests est à l’époque pratiqué quasi uniquement pour le milieu professionnel, très peu fréquenté par les femmes. De plus, comme souvent, lorsqu’un fait est rapporté, il est facile de transformer « ne semblent pas » en « ne sont pas affectées ».
Il a donc fallu attendre la toute fin du XXème siècle (très récent !) pour que soit prouvé que les femmes peuvent être touchées par le daltonisme, et que l’on comprenne pourquoi elles sont moins nombreuses. Mais encore une fois, cela n’a pas fait la une des journaux ! Et vu le peu de femmes daltoniennes pour véhiculer le message, l’information a du mal à être connue.
C’est donc ce manque d’information qui décrédibilise souvent les femmes affirmant souffrir de daltonisme.
Mes enfants seront-ils daltoniens ?
Encore une fois, l’article Pourquoi est-on daltonien ? traite la question en détail. Nous allons donc extraire ici uniquement ce qui est relatif aux femmes daltoniennes. Les possibilités sont les suivantes :
Mère daltonienne, père sain
Dans ce cas, les enfants masculins seront obligatoirement daltoniens et les filles porteuses saines (vision normale mais pouvant transmettre le gène)
Mère daltonienne, père daltonien (même daltonisme)
Même daltonisme signifie même cône affecté. Cette fois-ci, tous les enfants seront obligatoirement daltoniens, pas d’exception à la règle.
Mère daltonienne, père daltonien (autre daltonisme)
Ce cas est très similaire au premier cas. Les fils seront forcément daltoniens (daltonisme de la mère) et les filles auront une vision normale. En revanche, elles seront porteuses saines de 2 types de daltonismes.
En conclusion
La rareté et la découverte récente de cette distribution ont donc formé une solide réputation d’exclusivité masculine du daltonisme. Le temps et les nouvelles technologies de l’information commencent à balayer cette idée reçue totalement fausse. Parlez-en autour de vous ou partagez cet article et vous contribuerez à éradiquer cette fausse croyance !
Merci.
Alors, j’avais lu (il y a longtemps) qu’en fait ce serai les femmes qui donnerai les gènes du daltonisme, via leur père et autre ascendant. Et que ça sauterai une génération souvent. Je pense que c’est plus une « rumeur », mais j’aimerais avoir votre avis si vous avez cherché dans ce sens.
Moi et mes frères ne le sommes pas; daltonien. En revanche, mon fils ainé l’est. Ces 2 grand-pères l’étaient.
Bonjour,
C’est effectivement à peu près ça, statistiquement, c’est ce qui a le plus de chance de se produire
J’ai détaillé tout ça dans l’article https://lesyeuxdudaltonisme.fr/pourquoi-est-on-daltonien/